NCAA Messieurs 2018 jour 4 : Caeleb Dressel a gagné des batailles, et le Texas d’Eddie Reese a gagné la guerre

Eric Lahmy
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March 25th, 2018 Français

Ancien nageur, Eric Lahmy est journaliste, écrivain, rédacteur en chef, et reporter. Il anime depuis 2013 Galaxie-Natation, un blog dédié à son sport préféré.

Dimanche 25 Mars 2018

Donc Caeleb Dressel l’a fait. Il s’en est fallu de peu, mais ces dix centièmes de mieux que l’an passé, 39s90 contre 40s, sur 100 yards nage libre, représentent une nouvelle contribution du nageur clé du jour à la progression de la natation. Pourquoi passer les 40 secondes est-il plus remarquable que les 43 ou les 44 secondes ? C’est comme ça ! Tous ceux qui connaissent la natation savent que John Weissmuller a nagé le premier « sous » la minute au 100 mètres, que la première femme à le rejoindre fut Dawn Fraser, mais on ne se souvient pas trop des nombreux autres.

Cela dit, la course en yards petit bassin a surtout la force d’une coutume locale, et je ne saurais d’ailleurs dire si les 39s90 réussis par Dressel hier dans le bassin Freeman de Minneapolis, dans le Minnesota, valent beaucoup mieux que les 44 secondes et 94 poussières de Max Leveaux (même bardé de polyuréthane). En valeur, sans doute, mais en vitesse pure ? En combien Leveaux eut-il été chronométré au passage des 100 yards ?

D’une certaine façon, je pensais que Dressel nagerait plus vite qu’il ne l’a fait. Gagner 48/100e de seconde sur 50 yards n’indiquait-il pas un gain d’une pleine seconde sur la distance double ? En fait, je n’en savais rien. Il y avait deux façons de voir les choses, l’une liée au Dressel de 2016, l’autre au Dressel de 2017.

CAELEB DRESSEL 2018 PLUS PRES DE LA VERSION 2016 QUE 2017 ?

Car ce n’était pas tout à fait le même nageur. En 2016, c’était un « pur » sprinteur qui établissait le record des 50 yards qui allait tenir deux saison, et jusqu’à ce jeudi : 18s20. Cette même année, Dressel nageait ses 100 yards en 40s46.En 2017, Dressel montrait des aptitudes un peu différentes : il s’imposait, outre le crawl et le papillon, ses deux chevaux de bataille, comme un formidable nageur de brasse de circonstance (à la Florent Manaudou, soit dit en passant, ou à la Roland Schoemann) mais aussi un grand « quatre nageur ». Il apparaissait (et était sans doute) plus résistant, parce qu’un 200 yards quatre nages exige quand même un minimum de ressources dans le domaine. D’ailleurs, l’été 2017, aux championnats US, il nageait un 200 mètres en 1’47s45, une performance hors d’atteinte d’un « pur « sprinteur… Dressel version 2017 était assez costaud sur les distances moyennes.

Je ne sais si Dressel a perdu un peu de la résistance démontrée l’an passé, mais en tout cas il n’a pas été utilisé sur le quatre nages. On l’a comme dans son programme de 2016, sprint-sprint-sprint. Et ça a payé sur 50 : passer en une journée, par étapes, à 18s11, 17s81 et 17s63 contre ses 18s20, record d’il y a deux ans, rapporté à son 40 secondes, une telle progression indiquait un possible 39s, voire même un 38s8 ou 38s9. Il n’était pas interdit de rêver. Mais rapporté au 40s46 de 2016, ce surcroit de vitesse de base donnait un possible 39s5 et à tout le moins un passage sous les quarante.

Il est toujours gênant de dire, après un exploit comme celui de Dressel, qu’il aurait pu faire mieux, et de toute façon, ce n’est pas sûr. Cent dix minutes plus tard, il s’élançait troisième relayeur du quatre fois 100 de son équipe. Et réalisait un parcours lancé en 40s25àfond la caisse, vu qu’il n’était pas en tête et ne parvint à remonter…

Je crois que Dressel, quoique surhumain par certains côtés, commençait à fatiguer…

100 YARDS. – 1. Caeleb Dressel, Florida, 39s90 (18s96 + 20s94); 2. Ryan Held, North Carolina State, 41s08 (19s54 + 21s54); 3. Justin Ress, North Carolina State, 41s49 (19s74 + 21s75); 4. Blake Pieroni, Indiana, 41s51 (19s54 + 21s97); 5. Jacob Molacek, North Carolina State, 41s55 (19s94 + 21s61); 6. Townley Haas, Texas, 41s67 (19s98 + 21s69); 7. Tate Jackson, Texas, 41s81 (20s17 + 21s64); 8. Santo Condorelli, USC, 42s34 (19s59 + 22s75).

Dans sa course individuelle, DRESSEL prenait une avance considérable d’entrée. A son passage en 18s96, son avance était presque incongrue, les autres finalistes s’étageant entre 19s54 (Ryan Held et Blake Pieroni) et 20s17 (Tate Jackson). Et il continuait de s’échapper vers l’avant. Effet de cette supériorité décourageante greffée sur une glisse de loutre ? Trois des finalistes furent moins vite qu’en qualification, où, il est vrai, ils avaient dû s’employer ferme en se disputant les seize places de finalistes (celles qui accordent des points à leurs équipes)…

Autre curiosité ? Zac Apple, vainqueur de la finale B en 41s36, nageait plus vite que le 3e de la grande finale.

1650 YARDS : 1. Anton Ipsen, North Carolina State, 14’24s43 ; 2. Felix Auboeck, Michigan, 14’29s42 ; 3. Nick Norman, California, 14’30s82 ; 4. Zac Yeadon, Notre Dame, 14’35s98 ; 5. Marcello Acosta, Louisville, 14’38s22 ; 6. PJ Ransford, Michigan, 14’38s23.

Sur 1650 yard, Anton Orskov Ipsen, un étudiant Danois (ingénierie industrielle) en 4e année de North Carolina, s’impose devant Felix Auboeck, un Autrichien de Michigan, déjà 2e de la même épreuve l’an dernier, qu’il parvient à décrocher d’abord difficilement grâce à un train très proche du negative split (course en accélération). Pratiquement ensemble aux 900 et encore aux 1000 yards, les deux hommes sont séparés finalement de cinq secondes. Ipsen a terminé 5e de la même course en 2015 et en 2016…14 nageurs passent sous les 14’45s.

200 YARDS DOS.- 1. Austin Katz, Texas, 1.37s53 [23s01, 47s51 (24s50), 1.12s62 (25s11), 1.37s53 (24.91)]; 2. John Shebat, Texas, 1.37s94 [22s23, 46s42 (24s19), 1.11s63 (25s21), 1.37s94 (26s31)]; 3. Patrick Mulcare, USC, 1.38s43 [23s26, 47s99 (24s73), 1.12s72 (24s73), 1.38s43 (25s71)]; 4. Bryce Mefford, California, 1.38s48 [23s51, 48s03 (24s52), 1.13s12 (25s09), 1.38s48 (25s36)]

Du nouveau sur 200 yard dos, où deux étudiants de première année (freshmen) se placent respectivement premier (Austin Katz, de Texas) et quatrième (Bryce Mefford, de California. Katz, natif de Tarpon Springs, en Floride, 19 ans ce 19 mars, suit comme souvent une tradition familiale, son aînée Taylor (Florida) et son frère Alexander (Michigan) se sont fait payer avant lui leurs études par la natation. Lui-même a été médaillé de bronze aux mondiaux juniors et d’argent aux Jeux universitaires. Eddie Reese réussit à placer ses deux Texans 1 et 2 de la course, soit 36 points précieux pour gagner le classement par équipes !

200 YARDS BRASSE.- 1. Ian Finnerty, Indiana, 1.51s08 [24s54, 52s30 (27s76), 1.21s08 (28s78), 1.51s08 (30s)]; 2. Andrew Seliskar, California, 1.51s17 [25s01, 53s58 (28s57), 1.22s03 (28s45), 1.51s17 (29s14)]

Ian Finnerty réalise le doublé 100 et 200 yards brasse. Sur la distance la plus longue, il se qualifie en 1’50s78 et ne parvient pas à nager aussi vite en finale, mais 1’51s08 sera suffisant pour la victoire.

Il s’en faut de peu, car après qu’il ait engrangé une longueur de corps d’avance sur Andrew Seliskar au virage de la mi-course, Seliskar revient et lui reprend pratiquement toute son avance, n’échouant qu’à six centièmes pour gagner.

200 YARDS PAPILLON: 1. Andreas Vazaios, North Carolina State, 1.38s60 [(22s54, 47s95 (25s41),1.13s04 (25s09), 1.38s60 (25s56)]

Le Grec Andreas Vazaios triomphe sur 200 papillon en nageant à l’encontre de la pratique de la spécialité, s’efforçant à l’égalité d’allure. Il n’y parvient pas réellement, mais passe en 47s95 pour finir en 50s65, ce qui est démontrer un équilibre de train nettement meilleur que ses suivants, Switkowski, 47s12 et 52s43, et Vinicius Lanza, 47s47 et 52s28. Le record NCAA et national de Jack Conger, 1’37s35, n’est guère approché.

4 FOIS 100 YARDS : 1 North Carolina State, 2.44s31 [Ryan Held, 19s51, 41s05; Justin Ress, 1.00s15 (19s10), 1.21s67 (40s62), Jacob Molacek, 1.41s05 (19s38), 2.2s69 (41s02), Coleman Stewart, 2.22s35 (19s66), 2.44s31 (41s62)]; 2. Florida, 2.45s73 [Khader Baqlah, 20s42, 42s28, Jan Switkowski, 1.1s90 (19s62), 1.23s53 (41s25), Caeleb Dressel, 1.42s56 (19s03), 2.3s78 (40s25);Mark Szaranek, 2.23s39 (19s61), 2.45s73 (41s95); 3. California, 2.46s54 [Justin Lynch, 19s88, 41s97; Andrew Seliskar, 1.1s82 (19s85), 1.23s81 (41s84), Ryan Hoffer, 1.43s08 (19s27), 2.5s (41s19); Michael Jensen, 2.24s56 (19s56), 2.46s54 (41s54).

Le record détenu par l’Université du Texas depuis l’an passé, 2’45s39, est battu à deux reprises, par le quatuor de Caroline du Nord, en séries, 2’44s75, et en finale, 2’44s31. Ryan Held est le plus rapide au start avec 41s05 (et 41s09 en série). Toujours pour North Carolina, Justin Ress nage 40s35 lancé en série (et 40s62 en finale). Pour Florida, Dressel nage 40s15 en séries, 40s25 dans la finale. Seul autre sous les 41 secondes lancé, Blake Pieroni, 40s77. Très grande densité, avec six nageurs au start sous les 42 secondes, sept lancés sous les 41s5.

TEXAS ET EDDIE REESE PLUS DIFFICILEMENT QU’EN 2017

Derrière les exploits de tel ou tel, de ce relais ci ou là, un autre match se joue, il est d’ailleurs le vrai match, celui des coaches. Une fois de plus, c’est Eddie Reese qui a gagné, Texas, à la onzième heure, ayant réussi à accumuler le plus de points. Malgré Dressel, Florida est seulement cinquième. C’est le système de pointage qui veut cela, parce qu’il accorde des points jusqu’au 16e classé. Un exemple ? Quand Dressel gagne les 100 yards, il marque 20 pts, et Florida marque 22 pts, ceux de Caeleb et deux de Khader Baqlah, 15e. Cependant, North Carolina marque 47 points en raison des places de 2e 3e et 5e de Ryan Held, Justin Ress et Jacob Molacek, et Texas en marque 30 avec Townley Haas, 6e,Tate Jackson, 7e, et Brett Ringold, 12e.

A l’arrivée, privé de ses plus grandes vedettes, Texas l’emporte quand même, mais moins brillamment qu’en 2017, où l’université, 542 pts, avait largement dominé California, 349pts. Ici, il s’en est fallu de moins de douze points, mais Eddie Reese s’en sort une nouvelle fois vainqueur.

Né le 23 juillet 1941, le vieil Edwin Charles Reese va-t-il rempiler ? Après 14 championnats NCAA, record absolu, il pourra prendre une retraite bien méritée. Dans le cas contraire, il aura toujours deux ans (moins un jour) de moins que le président de la FINA…

CLASSEMENT PAR EQUIPES D’ UNIVERSITES

1.Texas, 449pts; 2. California, 437.5pts; 3. Indiana, 422pts; 4. NC State, 385pts; 5. Florida, 347pts; 6. Southern California, 253pts; 7. Stanford, 205pts; 8. Michigan, 168.5pts; 9. Louisville, 156pts; 10. Georgia, 129pts; 11. Tennessee, 123pts; 12. Auburn, 98.5pts; 13. Alabama, 95pts; 14. Texas A&M, 75pts; 15. Minnesota, 67pts; 16. Arizona, 64pts; 17. South Carolina, 60pts; 18. Harvard, 58pts; 19. Purdue, 54pts; 20. Arizona State, 45pts; 21. Florida State, 42pts ; 22. Denver, 31pts ; 23. Missouri, 29pts ; 23. Notre Dame, 29pts ; 23. LSU, 29pts ; 23. Cornell, 29pts ; 27. Miami, 27pts; 28. Ohio State, 25pts; 29. Virginia, 19pts; 30. Penn State, 14pts; 31. Towson, 11pts; 32. Utah, 10pts; 33. Duke, 9pts; 33. Virginia Tech, 9pts; 35. Grand Canyon, 7pts; 36. U North Carolina, 6pts; 36. Hawaii, 6pts; 38. West Virginia, 2.5pts; 39. Iowa, 2pts; 40. Wyoming, 1pt; 40. Southern Methodist University, 1pt.

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About Eric Lahmy

Eric Lahmy

Né à Tunis en Tunisie le 1er juin 1944, Eric Lahmy est journaliste, écrivain, rédacteur en chef, et reporter. Nageur, il a été champion de Tunisie du 200 mètres brasse en 1964. Il a ensuite été journaliste à L’Equipe entre 1969 et 2011, il a effectué de multiples collaborations, dont …

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